Se couper du monde : la fin d’un cycle, le début d’une renaissance
Le minimalisme est très difficile à appliquer dans notre environnement quotidien d’occidentaux repus de surconsommation. La tentation est partout. Les automatismes de consommation sont là, toujours prêts à nous surprendre à la moindre faute d’inattention. Nos amis nous sollicitent au « toujours plus », dépenser plus, sortir plus, manger plus, boire plus,… et quoi de plus simple que de céder, c’est si facile d’écouter nos envies et si dure de s’autodiscipliner à aller vers le « moins », et ce même si les résultats sont probants. Car prenons l’exemple de l’alcool, nous sommes bien mieux et plus en forme lorsque nous ne buvons que de l’eau, mais boire un bon verre de vin nous régale et il n’y rien de mal à cela, cependant, qui s’arrête à ce simple verre ? - Peu de monde. Beaucoup comme moi, allons en consommer plusieurs pour finir par les enchainer jusqu’à être dans cet état euphorique si bon, mais qui dur si peu de temps… les lendemains eux seront rudes et il nous faudra beaucoup d’énergie et de patience pour nous remettre de ces soirées bien arrosées. Et pourtant bien que nous connaissons les effets secondaires par cœur (qui n’a jamais hurler : « plus jamais d’alcool, c’est fini ! » nous continuons de céder facilement à cette tentation. Donc nous sommes prêts à payer la facture chère pour de brefs moments pas toujours si intenses. Par contre nous n’arrivons pas à payer un prix plus faible pour obtenir pourtant plus de résultat sur notre bienêtre général : c’est le paradoxe de l’homme moderne. Effectivement vivre sainement coût bon marché, manger des légumes coûtent moins cher qu’une bouteille de whisky, un petit appartement coquet bien moins qu’une maison demandant un entretien constant, une grasse matinée en amoureux bien moins qu’une restaurant hors de prix en compagnie des mauvaises personnes, etc.
Donc en tant que minimalistes que nous sommes, nous luttons contre ces invraisemblances de la vie pour nous concentrer sur l’essentiel. C’est ici même que je vous enjoins à partir loin de tout afin de vous retrouver coupé du monde pour en approcher enfin l’essence.
Je vais vous donner un exemple concret d’une telle rupture via mon expérience faite avec mon ami Stefano à Dakhla au Maroc lors d’un stage de kitesurf durant une semaine. Notre périple avait pourtant commencé en fanfare en passant une nuit à parcourir les bars, les restaurants et les clubs de nuits de Casablanca. Puis direction Dakhla dans le désert du Sahara en bordure de l’Atlantique à une 40 minutes de cette ville perdu au milieu de nulle part nous sommes arrivés dans un camp de kiters au beau milieu de cette région aride avec pour seul paysage un lagon de mer bleue, une route coupant le désert et un camp à la couleur sable qui se noyait dans le décor environnant. Pour seul compagnons de fortune une équipe d’une vingtaine de touristes venus ici pour le vent et le lagon et une dizaine d’employés dédiés au service du camp. Le confort de notre logement était sommaire, avec deux lits, une armoire, une table de chevet, une lampe et un tapi. Les WC et les douches étaient communs et situé à une quinzaine de mètres de notre bungalow. Les nuits étaient fraîches avec du vent soufflant en bourrasque, ce qui fait que nous avions plus l’impression d’être dans un refuge de haute montagne perdu au milieu du valais, plutôt qu’en bord de mer. Les repas étaient servis dans une cantine ou nous étions tous attablés à la suite d’une grande table n’en finissant plus. La nourriture était excellente, très simple, sans fioriture mais bonne et saine, des viandes ou du poisson grillés, des légumes, des soupes. Les portions était toutes les mêmes, impossible de manger trop. Nos journées étaient rythmées par le vent et ses caprices. Nous attentions les bonnes conditions pour sortir faire quelque heure de kitesurf.
Si nous avions la chance de pouvoir sortir le matin et l’après-midi alors nous coupions la journée par un lunch à midi et une sieste bien méritée après des heures passé dans l’eau. L’internet ne fonctionnait pas ou presque et le réseau cellulaire lui aussi passait mal. Le premier jour fut rude, le confort était si spartiate, le vide tout autour de nous si vaste, et ce temps qui ne s’écoulait pas semblait être notre ennemi, seul l’amitié nous réconfortait et notre espoir de progresser dans notre sport nous empêchait de fondre en larme en pensant à notre confort de vie européenne. Nous étions loin de nos amis, de notre travail, de tous nos repères et pourtant un sentiment immense allait grandir en nous. Un sentiment de justesse. La justesse est ce sentiment d’être dans le vrai, de pouvoir contempler le monde tel qu’il est vraiment. La simplicité des lieux et de notre vie monacale finirent par nous apaiser, nous allions nous coucher tôt vanné d’une fatigue saine, nous avons fini par presque oublier nos téléphone portable, nos amis, nos amours, nos soucis et nos envies d’alcool et de cigarettes. Les premières siestes qui nous paraissaient pourtant si longues à nos débuts finirent par nous apporter un sentiment de paix immense que nous finissions par attendre avec impatience. Se ressourcer, méditer, ne rien faire, se laisser porter par le présent, attendre, pour finir par entendre sa respiration, sentir les différents cycles de vie nous habiter comme celui de manger, de dormir, de boire. Notre seule attention était portée sur notre sport, nous n’avions qu’un objectif par jour qu’un seul. Nous n’avions rien et pourtant nous étions habités par une énergie nouvelle. Tout le superflu ne nous manquait plus, il nous fallait si peu pour être bien… Et pourtant, ET POURTANT, il nous a fallu rentrer, nous embarquions plein d’espoir d’une vie plus calme et plus détachée de notre quotidien suisse mais dès notre vol de retour nous lisions les journaux qui ne parlaient que de drames humains, à peine arrivé le téléphone rallumé nous bombardait de messages sans discontinuer et la routine a fini par nous ramener à nos vies antérieures. Tout était perdu ou presque. Nous n’avons pu garder que quelques jours ce sentiment d’avoir été dans le vrai.
Pour ma part il est toujours difficile de quitter l’Afrique car ce continent vit dans le présent. Le passé n’est pas si important et l’avenir bien trop incertain, pour que soit la nostalgie soir les angoisses du futur ne viennent nous perturber. Seul la vie présente compte, le mental s’efface et laisse la place à l’esprit. Vivre ainsi c’est avoir un accès direct à son « soi profond » et à ce qui nous entoure. C’est vivre la vraie vie. C’est ainsi éviter tous ces stress inutiles de nos vies et conscientiser notre existence.
Couper de notre civilisation est le seul moyen vraiment rapide et efficace de se recentrer sur soi et de chercher une source de motivation suffisante pour continuer ce combat de tous les jours qui est de se délester de tout notre superflu pour ne garder que l’essentiel.
Belle journée ou belle soirée à vous !
Edouard Coste
FB : minimalisme.ch et Edouard Coste